Chronique de ceux qui ne s’arrêtent pas
Ils traversent la ville comme on traverse une saison. Ils n’ont pas de destination précise, seulement l’allure d’un mouvement continu. Ils marchent, attendent, se croisent, s’évitent, regardent ailleurs. Ils s’effacent, réapparaissent, s’inscrivent furtivement dans une rue, un reflet, une vitrine, une ligne blanche. Dans les capitales du monde, le voyage n’est pas toujours un départ ; parfois, il se mesure à l’échelle d’un pas.
Cette exposition rassemble des fragments d’existence glanés au détour de carrefours, de trottoirs et de passages piétons. Des silhouettes anonymes, des gestes modestes, des couleurs soudaines, un éclat rouge, l’ombre d’un visage. Parfois en noir et blanc, parfois saturées de lumière, ces images révèlent le langage silencieux de ceux qui habitent la ville sans jamais y rester vraiment. Ils attendent un train, patientent au coin d’une rue, rient au bord d’un café, observent une affiche, portent un sac, tiennent un enfant, regardent un mur. Leur voyage se joue dans l’infime.
Chaque photographie décrit un récit interrompu, comme une phrase laissée en suspens. Ce qui nous échappe devient une trace. Ce qui semble banal prend valeur d’énigme. Entre immobilité et mouvement, ces instants captent le passage plus que la présence, la trajectoire plutôt que le portrait. C’est une chronique du temps qui file, du quotidien qui ne se laisse pas retenir.
Ceux qui ne s’arrêtent pas ne cherchent pas l’événement. Ils incarnent le voyage comme façon d’être au monde. Ils ne posent pas, ne racontent rien, pourtant tout se devine. Leur errance est une écriture, et les rues sont leur page.