Zoom sur... Michel CRAMATTE (janvier 2018)

Les fantômes ont la vie dure ! C'est ce que va nous faire découvrir Michel Cramatte à travers une série qui allie originalité et sens du détail. Une exposition pleine de mystère, à la scénographie soignée.

SIte internet de Michel Cramatte : www.michel-c.fr

Pouvez-vous vous présenter en quelques mots ?

J'ai 44 ans, je suis pacsé et père d'une merveilleuse fille qui vient d'avoir 6 ans. Nous habitons à Audincourt. Je suis informaticien, consultant au sein d'une importante société de conseil.

Quand et pourquoi avez-vous commencé à photographier ? Avec quel appareil ?

J'ai toujours aimé faire des photos, d'abord pour garder des souvenirs, ensuite pour avoir des objets de déco personnels. J'ai acheté mon premier compact (un Nikon, je crois) il y a une bonne vingtaine d'années ; les appareils numériques commençaient à se démocratiser, mais les reflexs coûtaient une fortune et ne concurrençaient pas encore les argentiques.

C'est en 2011 que j’ai commencé à vraiment apprendre la photo. Je souhaitais maîtriser ce que je faisais, plutôt que laisser l’appareil faire les choix à ma place. C'est à ce moment que je suis passé au reflex.

Qu'est-ce que vous apporte l'acte photographique ?

En quelques années, les choses ont bien changé : la photographie est devenue un outil de développement personnel.

- J’ai remarqué que les expositions m’aidaient à prendre confiance.

- Mes séries réalistes deviennent un moyen d'expression, contribuent à améliorer mon affirmation.

- Mes séries fictives sont l’occasion de travailler ma créativité, ce qui n'est pas mon fort initialement, loin de là !

- Le statut d’auteur me permet de découvrir ce qu’entreprendre signifie.

La photographie est pour moi comme un long chemin, un sorte de quête sans fin. Et c'est très bien qu'il n'y ait pas de fin ! J'ai hâte de voir où cela va me mener.

Comment définiriez-vous votre pratique ?

Je suis actuellement 2 chemins très différents :

- d'un côté, je m'efforce de créer des images totalement fictives : au travers de mes « Jeux de lumière » ou de ma série « Au-delà », je présente des images que vous ne verrez pas dans la réalité, qui n’existeraient pas sans l’artifice photographique.

- d'un autre côté, je propose des images très réalistes ; dans ce cas, je cherche à faire des images porteuses d’information (à l'image du reportage exposé en décembre à l'Espace Gandhi), voire d’un message.

Ces contenus peuvent sembler opposés mais, comme je le disais un peu plus haut, ce sont deux axes de progrès personnel. A ce titre, ils sont pour moi complémentaires.

Votre exposition s’intitule « Au-delà ». Pouvez-vous nous en dire plus ? 

L'idée est née début 2016 : avec David, un ami avec qui je collabore régulièrement, nous partagions cette envie de créer des images fantomatiques. Ayant un lieu parfait pour ça, nous avons fait une première série, dont vous avez pu en voir un extrait lors des 2èmes Rencontres Photographiques de Couthenans. J'ai d'ailleurs eu de très bons retours lors de cette exposition.

Néanmoins, je restais un peu sur ma faim : il fallait donner une suite à cette histoire ! C'est chose faite depuis cet automne, avec des prises de vues dans 2 nouveaux lieux, un second personnage et un scénario.

Quelle scénographie allez-vous mettre en place pour votre exposition ? 

Je cherche à raconter une histoire, les cadres affichés aux murs suivront donc une certaine chronologie. Les premiers, en tout cas.

Par ailleurs, j'aimerais surprendre mes visiteurs en les mettant en présence des fantômes que j'ai photographiés. J'ai même réalisé une partie des prises de vues spécifiquement pour cette exposition ! Je n'en dis pas plus : ce thème mérite une part de mystère...  ;-)

Quel regard portez-vous sur la photographie en général ? 

Je suis à la fois enthousiaste et inquiet :

- Je suis enthousiaste à la vue de tous les progrès techniques qui font évoluer nos outils et nos pratiques photographiques ; là, c'est le technophile qui parle : j'ai déjà hâte de voir les merveilles technologiques de 2020, 2025, 2030...

- Je suis en revanche plus inquiet pour celles et ceux qui s'efforcent aujourd'hui d'en faire leur métier. L'image est aujourd'hui partout, tous les medias nous en abreuvent de plus en plus, mais à qui cela profite-t-il ? Quels photographes ont une chance de tirer leur épingle du jeu ? A l'image d'autres métiers, je crains que quelques grosses entreprises se partagent le gâteau et ne laissent que des miettes à leurs employés et aux indépendants. J'espère que l'avenir me donnera tort.

Quel grand maître de la photographie admirez-vous le plus ?

Je suis admiratif du travail de Sebastiao Salgado. Je trouve ses paysages, mêlant détails et immensité, tout simplement époustouflants.

Et puis c'est aussi pour moi une part de rêve : parcourir le monde, le découvrir, le photographier... J'aurais adoré ça !

Quel genre photographique vous attire-il ? 

La photographie sociale, militante, engagée. C'est une voie que je poursuis : être capable de faire passer un message fort par le biais de la photographie. Il y a bien des choses qui me révoltent dans ce monde, et j'aimerais trouver dans la photographie un moyen d'exprimer ce que je ressens. Je présenterai en 2018 une série contre les violences conjugales. C'est un premier pas. J'ignore si je serai capable d'en faire d'autres, mais je compte bien réessayer.

Quelles sont les principales difficultés liées à votre pratique photographique ?

Le manque de temps... Entre un emploi à plein temps, une vie de famille bien remplie et une activité sportive, la photographie s'est faite une petite place dans mon emploi du temps mais n'en trouvera guère plus. Résultat : j'ai des tas de projets, et je sais déjà que je ne les concrétiserai pas tous. Mais ce n'est pas très important : peu importe la quantité d'images que je fais ou que je montre, ce sont le contenu et le cheminement qui est comptent.

Quel matériel utilisez-vous ?

J'ai trouvé dans le Pentax K-3 l'outil qu'il me fallait. J'apprécie tout particulièrement la stabilisation intégrée qui permet d'utiliser des vieux objectifs de la même façon que les plus récents. J'ai notamment des objectifs Takumar à monture M42 dont le rendu est splendide et qui s'utilisent très facilement sur les boîtiers Pentax. Et puis c'est rassurant d'avoir du matériel tropicalisé : la pluie et la poussière ne font plus peur.

Quels sont vos 2 objectifs préférés ?

Le Nº1, sans hésitation, c'est le Pentax 31mm f/1.8 : il a un rendu magnifique ! Et pour une focale fixe, il s'avère très polyvalent. A ses côtés, je mettrais le Pentax 16-85, archi-polyvalent et très piqué. Depuis que je les ai, ce sont les 2 objectifs qui sortent le plus souvent.

Focales fixes ou zoom ? Pourquoi ce choix ? 

Les 2, sans hésiter ! On oppose souvent ces deux familles d'objectifs, mais personnellement je les trouve très complémentaires. Dans ma pratique, j'imagine d'abord les images que je vais faire, puis je choisis ensuite le matériel adapté ; je ne saurais dire si j'utilise plus souvent les zooms ou les focales fixes.

Avez-vous d’autres sources d’inspiration que l’art photographique ? 

Oui : la peinture et le cinéma. Je vois la peinture comme la concrétisation de l'imaginaire du peintre : c'est tout-à-fait la démarche que je cherche à mettre en œuvre. La peinture vient en quelque sorte enrichir mon processus de création. Pour le cinéma, c'est différent : j'y découvre des images qui alimentent mon imagination, des cadrages et des points de vues que je trouve efficaces et que je vais chercher à mettre en œuvre. C'est donc une source d'inspiration directe.

Avez-vous un accessoire qui vous est particulièrement utile dans votre approche photo ?

Le sac. Ou plutôt LES sacs : j'en ai 4, de 4 tailles différentes. Ainsi, je choisis le matériel en fonction des photos que je vais faire, et j'ai toujours un contenant adapté au besoin.

Avant de porter l'appareil photo à votre œil, avez-vous déjà imaginé le cadrage de la photo ? 

Oui, toujours. Ça va même plus loin : je m'efforce de plus en plus d'imaginer et de préparer mes images à l'avance, je les ai donc en tête avant de sortir pour les faire.

Pour vous, l'appareil photo est un outil ou un instrument ? 

Un outil, sans hésiter : il est le moyen, presque le prolongement de ma main, me permettant de réaliser les images que j'ai en tête.

Comment choisissez-vous vos images lors de l'éditing sur l'ordinateur ? 

Je fais une première lecture rapide pour supprimer les images ratées et les doublons. Dans la foulée, je procède à une seconde lecture afin de conserver les images qui sont les plus proches de mon intention de départ. Tout ceci est fait sans trop tarder, afin d'avoir l'objectif initial bien en mémoire, ainsi que le ressenti pendant la prise de vues. Toutes les images qui passent ces 2 premières sélections sont alors post-traitées. Enfin, selon le besoin, comme par exemple pour construire une série à exposer, je peux être amené à faire une sélection plus fine. Cette dernière peut varier dans le temps ; j'ai par exemple exposé plusieurs fois mes "jeux de lumières", la sélection était à chaque fois différente.

Quels conseils donneriez-vous à un photographe débutant ?

Apprendre avant tout à composer une image et à déclencher avec une intention : que mettre dans le cadre ? Quel point de vue choisir ? Et surtout : pourquoi ? On apprend trop souvent la technique en premier, on se focalise sur le matériel et des performances techniques aussi séduisantes qu'inutiles, alors que l'essentiel est dans le contenu de l'image et le message qu'elle va porter.

Avez-vous un site internet, une page Facebook, ou autre ? 

Une site web, oui : www.michel-c.fr

Un petit mot pour vos lecteurs et futurs visiteurs ? 

Rassurez-vous : mes amis fantômes sont trèèèès gentils !   :-)